INV.AJ. 001/100

Alain Josseau

EXPOSITION
Exposition : Du 10 février 2023 au 25 mars 2023
Adresse : 35 rue Saint André, Lille
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Catalogue des oeuvres disponibles sur demande par mail où par téléphone :

Sur une proposition curatoriale de Christophe Wlaeminck

Texte par Christophe Wlaeminck

Lorsqu’on regarde attentivement le carton d’invitation de la première exposition personnelle d’Alain Josseau, à la galerie Provost-Hacker, on remarque que tout fait sens : tout y est révélé… Le visuel présente un détail du panneau central du retable de l’adoration de l’Agneau Mystique. Par ce détail, on s’aperçoit vite du travail d’appropriation et de déformation de l’image. Le sacré s’en trouve

profane. Le polyptyque fut peint par Jan et Hubert Van Eyck et fut achevé en 1432. Il se trouve actuellement conservé dans l’ancien baptistère, transformé en salle forte, en la cathédrale Saint Bavon de Gand, en Belgique néerlandophone.

Ce chef-d’oeuvre inestimable fut dérobé à maintes reprises pour parties, ensuite entier ;forfait des forces allemandes durant la seconde guerre mondiale. On a bien cru le perdre à jamais… Imprimé en noir et blanc, déformé à la manière d’une flaque de pétrole sinueuse, ce détail d’un tableau célèbre est fort parlant pour notre époque, où la technologie la plus fine côtoie le plus vulgaire. Initiée en 2008, une série de cent peintures à l’huile fut présentée, exhumée de leurs caisses, à la galerie Sollertis. Ce n’était pas la première fois que je me retrouvais face au travail artistique d’Alain Josseau. J’avais eu l’occasion, bien antérieure, de découvrir sa série d’aquarelles : « Le jardin des supplices » au même endroit, à Toulouse.

Ces cent peintures, dans leur dispositif de présentation, sont perpétuellement au même nombre.

Une exposition chassant l’autre, si un tableau est acquis par un collectionneur privé ou une institution, un autre le remplace… Aucun tableau ne figure deux fois dans la collection que s’est créé l’artiste.

Le noir et blanc n’est pas anodin. Ce choix monochromatique s’explique par la nécessité de se plonger dans le passé pour en apprécier toute la mesure, voire la démesure.

Le noir et blanc est source de réalisme chez certains, d’expressionnisme chez d’autres. Bref, personne n’y gagne à tergiverser sur la colorimétrie d’une vue de champ de bataille…

Alain Josseau a effectué de longues recherches sur le net et c’est en tant que peintre d’histoire qu’il nous donne à voir les dites cent peintures.Son enquête l’a menée à la découverte d’un fichier policier entretenu par les musées, où sont archivées des visuels d’oeuvres avec leur descriptif exhaustif.

L’artiste s’est alors efforcé de télécharger chaque visuel, peu importait la qualité de ces derniers, souvent issues de documents d’époque ; mal scannés. Certains étaient tellement maltraités par l’archivage numérique, qu’ils ressortaient illisibles de l’imprimante. C’est ce qui, justement, a interpellé notre homme…

En effet, chaque visuel d’oeuvre est issu d’un même registre numérique recensant un nombre très considérable d’objets et de tableaux dérobés aux musées et confisqués aux familles juives durant la seconde guerre mondiale.Ce registre est consultable sur le site du Ministère de la culture, rubrique MNR (biens Musées Nationaux Récupération). On y voit les visuels des oeuvres spoliées

mais aussi celles rendues à leur propriétaire légitime. Il est plus facile de rendre les oeuvres aux institutions publiques plutôt qu’aux particuliers. C’est la raison pour laquelle ce registre continue d’exister quatre-vingt ans plus tard…

De là, Alain Josseau s’est révélé à interpréter les oeuvres avec maestria ; s’ingéniant à exagérer les altérations parfois constatées.

Ici enfin, une nouvelle fois, nous nous retrouvons devant la représentation théâtralisée, indexée dans sa force comme dans ses faiblesses, d’une centaine d’oeuvres malmenées : et par l’histoire, et par la technologie contemporaine. Fort heureusement, sous nos yeux, l’artiste forge son oeuvre, tel un Héphaïstos moderne devant Chronos… au delà du temps.

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